REFORME DES RETRAITES

La loi sur les retraites a été adoptée par l’Assemblée nationale le 18 décembre 2013, validée par le Conseil constitutionnel et publiée au journal officiel le 21 janvier 2014.

Au cours de la concertation, la CFDT a pesé pour obtenir des mesures de justice. Elles auront un effet significatif pour les salariés exposés à la pénibilité ainsi que ceux qui ont effectué une longue carrière, les femmes et les salariés précaires ou à temps partiel, les jeunes et les basses pensions, ainsi que les polypensionnés. Le texte créée également un ensemble de mesures en faveur des personnes en situation de handicap et de leurs aidants.

Si la loi ne prévoit pas la réforme systémique demandée par la CFDT, elle met en place une gouvernance du système de retraite dans son ensemble. Celle-ci se traduira par un pilotage renforcé des régimes, fondé sur des objectifs y compris qualitatifs, notamment en matière d’équité et de simplification.

Cette info rapide détaille les mesures prévues dans le cadre de la réforme des retraites, qu’elles soient portées par la loi du 20 janvier 2014, la loi de finances pour 2014 ou encore par des décrets. Il s’agit de mesures :

de financement des régimes (1)
de justice sociale (2)
modifiant les dispositifs d’incitation à la poursuite d’activité (3)
de simplification (4)
de gouvernance du système de retraite (5)
1. Mesures de financement

1.1. Augmentation du taux de cotisation entre 2014 et 2017

L’augmentation du taux de cotisation retraite sera à terme de 0,60 point1 :
+ 0,30 point de part salariale
+ 0,30 point de part patronale

Pour les salariés du secteur privé, le calendrier est le suivant :

En 2014 : augmentation de 0,30 point répartie entre :
+ 0,15 point de cotisation salariale / + 0,15 point de cotisation patronale.

Entre 2015 et 2017 inclus : augmentation de 0,10 point par année, répartie entre :
+ 0,05 point de cotisation salariale / + 0,05 point de cotisation patronale.

Pour les agents des fonctions publiques la hausse du taux de cotisation salariale tient compte du calendrier de la précédente hausse de taux, décidée en 2010 :

En 2014 : augmentation de 0,06 point,
Entre 2015 et 2017 inclus : augmentation de 0,08 point par année.

Pour les agents qui relèvent des régimes spéciaux de retraite, un calendrier spécifique s’appliquera.

Dans un premier temps, la CFDT avait jugé équilibrée la hausse du taux de cotisation qui se partageait également entre employeur et salarié. La compensation ultérieure de la hausse de la cotisation employeur par une baisse équivalente (0,15 point de la cotisation famille) a conduit à réviser cette première appréciation. La baisse de ressources qu’entraîne pour la Caisse nationale des allocations familiales cette baisse de cotisation patronale famille sera en effet compensée par une dotation budgétaire de l’Etat. Comme le budget de l’Etat repose principalement sur des impôts acquittés par les ménages, l’équilibre est rompu.

Pour la CFDT, il est nécessaire de poursuivre les travaux engagés au sein du Haut conseil du financement de la protection sociale afin de définir un scénario de transfert de cotisations qui permette de dégager des marges de manœuvre.
L’utilisation de ces marges de manœuvre devrait être négociée au regard de deux priorités d’avenir :
•          d’une part l’investissement des entreprises en faveur de la recherche, de l’innovation, de la formation,
•          d’autre part l’investissement social par la consolidation du financement de la protection sociale et l’amélioration du pouvoir d’achat des salariés.
C’est désormais l’enjeu des discussions sur le Pacte de responsabilité de déterminer les contreparties à la suppression annoncée des cotisations famille.
1.2. Augmentation de la durée d’assurance à partir de 2020

Cette augmentation concerne l’ensemble des régimes de retraite.

La loi prévoit le calendrier pour les salariés affiliés au régime général et les agents des fonctions publiques.

D’ici 2020, la durée d’assurance reste inchangée: elle est de 41,5 années (166 trimestres) pour les assurés nés en 1955, 1956 et 1957.

Entre 2020 et 2035, la durée d’assurance permettant d’obtenir une retraite à taux plein augmentera d’un trimestre tous les trois ans. Elle passera ainsi :
de 41 années et 3 trimestres en 2020 pour les assurés nés en 1958,
à 43 années en 2035 pour la génération née en 1973 et les suivantes.

Pour un assuré né en :

Durée de cotisation correspondant à une carrière complète

Date de mise en œuvre

1958, 1959, 1960

41 ans et 3 trimestres

2020, 2021, 2022

1961, 1962, 1963

42 ans

2023, 2024, 2025

1964, 1965, 1966

42 ans et 1 trimestre

2026, 2027, 2028

1967, 1968, 1969

42 ans et 2 trimestres

2029, 2030, 2031

1970, 1971, 1972

42 ans et 3 trimestres

2032, 2033, 2034

A partir de 1973

43 ans

A partir de 2035

Pour les régimes spéciaux (hors fonctions publiques), un calendrier spécifique s’appliquera afin de tenir compte de la convergence de la durée d’assurance avec le régime général prévue par la réforme de 2007.

L’augmentation de la durée de cotisation interviendra à partir de 2020, sans accélération et sans modification de la règle d’évolution prévue en 2003, qui s’appuie sur un partage des gains d’espérance de vie à la retraite entre durée d’activité et durée de retraite :
deux tiers des gains d’espérance de vie sont affectés à une augmentation de la durée de cotisation ouvrant un droit à la retraite à taux plein,
un tiers des gains d’espérance de vie sont affectés à l’augmentation de la durée de la retraite.

Au cours de la concertation, la CFDT a obtenu que les efforts demandés en matière de durée de cotisation soient limités, équitables et s’inscrivent dans le prolongement des règles définies en 2003.

1.3. Fiscalisation de la majoration de pensions pour les parents d’au moins trois enfants
Les majorations pour les parents d’au moins trois enfants seront incluses dans l’assiette de l’impôt sur le revenu. Cette mesure s’applique dès 20142 aux majorations servies en 2013 par l’ensemble des régimes, y compris les régimes complémentaires (Arrco, Agirc, Ircantec).
Pour éviter que de nombreux retraités ne deviennent imposables du fait de cette mesure, un mécanisme de réduction ou d’annulation d’impôt a été renforcé en parallèle (décote fiscale).
Les majorations de pensions pour les parents d’au moins trois enfants sont versées aux hommes et aux femmes. Elles échappaient à l’impôt sur le revenu, ce qui aggravait les redistributions à l’envers en direction des retraités les plus aisés et au détriment des plus modestes. Cette mesure fiscale constitue un préalable indispensable à la refonte de cette majoration dans un sens favorable aux mères de famille et aux salariés à bas salaires (cf. 2.2).

1.4. Report de 6 mois de la revalorisation des pensions

La date de revalorisation des pensions de retraite des régimes de base est reportée de 6 mois, du 1er avril au 1er octobre de chaque année, sauf pour les titulaires :
de l’Allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA, ex-minimum vieillesse),
d’une pension d’invalidité,
d’une rente liée à un accident du travail ou une maladie professionnelle.

Dans ces 3 situations, la pension reste revalorisée au 1er avril de chaque année.

Parmi les retraités modestes, seuls les bénéficiaires du minimum vieillesse sont protégés du recul de la date de revalorisation des pensions.
Près d’un million de retraités qui vivent sous le seuil de pauvreté sans pour autant bénéficier du minimum vieillesse seront concernés par le report de la revalorisation des pensions. La CFDT  considère que ces retraités modestes auraient également dû être épargnés par la mesure.

2. Mesures de justice

2.1. Création d’un compte personnel de prévention de la pénibilité

A partir du 1er janvier 2015, un compte personnel de prévention de la pénibilité sera créé pour chaque salarié exposé à un ou plusieurs facteurs de pénibilité3.

La loi sur les retraites de 2003 indiquait que la définition et la prise en compte de la pénibilité, devait faire l’objet d’une négociation. Celle-ci n’ayant pas permis d’aboutir à un accord en 2008, le passage par la loi devenait incontournable. La mise en place du compte pénibilité est l’aboutissement d’un combat de tout le mouvement syndical, dont la CFDT a été le fer de lance.

2.1.1.  Public éligible

Le compte pénibilité concerne :

Les salariés des employeurs de droit privé, à l’exception des salariés affiliés à un régime spécial de retraite comportant un dispositif de prise en compte de la pénibilité,
Les agents non-titulaires de la fonction publique relevant d’un contrat de droit privé.

Les agents non-titulaires relevant d’un contrat de droit public ne bénéficient d’aucun dispositif de prise en compte de la pénibilité, qu’il s’agisse du « service actif », qui réduit l’âge minimal de départ en retraite à certaines conditions, ou du compte pénibilité. La CFDT considère que le compte pénibilité doit s’adresser à l’ensemble des agents non-titulaires de la fonction publique.

2.1.2. Obligations déclaratives

La déclaration repose sur la fiche de prévention des expositions renseignée annuellement par l’employeur pour chaque salarié exposé à la pénibilité. La fiche indique :
l’exposition à un ou plusieurs des 10 facteurs de pénibilité prévus par la réglementation lorsque l’exposition dépasse un seuil fixé par décret, après application des mesures de protection collective et individuelle,
la période d’exposition,
les mesures de prévention prises par l’employeur.
La fiche tiendra compte le cas échéant des situations d’exposition à la pénibilité liées à certains métiers reconnues par un accord collectif de branche étendu.

Elle sera transmise à la caisse de retraite (CARSAT) ou à la caisse de Mutualité sociale agricole (MSA) et toujours au service de santé au travail.

Les critères de pénibilité fixés par la réglementation ont été établis à partir des échanges ayant eu lieu entre partenaires sociaux lors de la négociation qui a échoué en 2008. La fiche d’exposition instituée en 2010 est donc remaniée et ouvrira désormais des droits au salarié. La CFDT sera particulièrement vigilante sur la définition des seuils d’exposition, qui devront être significativement inférieurs aux seuils légalement autorisés et refléter la réalité de la pénibilité pour les salariés concernés. La CFDT demande l’ouverture d’une concertation qui abordera notamment la question des seuils d’exposition.

2.1.3. Conditions d’acquisition des points

L’exposition à un ou plusieurs facteurs de pénibilité ouvre droit à l’acquisition de points sur le compte personnel de prévention de la pénibilité, dans une limite maximale de 100 points.

Un trimestre d’exposition à un facteur de risque permettra d’inscrire un point sur le compte pénibilité. Le barème sera doublé dans deux situations :
En cas d’exposition à plusieurs facteurs de risques simultanément,
Pour les salariés en fin de carrière toujours exposés à la pénibilité lors de la mise en place du compte, dans des conditions à préciser par décret. Le gouvernement envisage d’autoriser le doublement des points pour les salariés âgés d’au moins 59 ans et demi au 1er janvier 2015.

L’accès au doublement des points est trop restrictif pour les salariés en fin de carrière qui sont encore exposés à la pénibilité. La CFDT demande que le décret d’application prenne mieux en compte leur situation spécifique et améliore leurs droits.

2.1.4. Conditions d’utilisation des points

10 trimestres d’exposition, soit 10 points, génèrent un droit d’1 trimestre.

Compte-tenu de la limite de 100 points sur le compte, les droits ouverts sont d’une durée maximale totale de 10 trimestres soit 2 ans et demi, utilisables de trois manières différentes, qui peuvent se combiner :

une action de formation professionnelle continue en vue d’une reconversion vers un emploi moins exposé. Les points du compte pénibilité sont convertis en heures de formation qui abondent le compte personnel de formation.
Les 20 premiers points acquis sur le compte devront obligatoirement être utilisés pour une action de formation, sauf pour les salariés âgés d’au moins 52 ans au 1er janvier 2015 (à confirmer par un décret).

un passage à temps partiel avec maintien de la rémunération et des cotisations sociales. Ce droit est utilisable à tout moment de la carrière. Un refus de l’employeur doit être motivé compte tenu de l’activité économique de l’entreprise. En cas de désaccord du salarié, celui-ci peut saisir le conseil des prud’hommes.

un départ à la retraite anticipé, par l’octroi d’une majoration de durée d’assurance et d’une possibilité de départ avant l’âge légal. Le départ à la retraite pourra intervenir :
au plus tôt à 60 ans dans le cadre du dispositif pénibilité : jusqu’à 8 trimestres pourront être validés à ce titre. La pension sera alors calculée à taux plein pour les assurés ayant réuni une carrière complète, mais avec une décote pour les salariés dont la carrière est incomplète.
au plus tôt à 58 ans dans le cadre du dispositif carrière longue. Les trimestres validés au titre de la pénibilité seront considérés comme cotisés pour le bénéfice de la retraite anticipée pour carrière longue (à taux plein).

La CFDT a obtenu que le barème appliqué génère une année de droits pour 10 années d’exposition. Elle a également obtenu un abaissement de l’âge de suspension de l’obligation d’utiliser les 20 premiers points en formation.

Cependant, la loi reste insuffisamment protectrice pour les salariés en fin de carrière qui ont un historique d’exposition à la pénibilité. Seuls les salariés qui sont encore exposés à la pénibilité sont concernés par les deux mesures dérogatoires :
suspension de l’obligation d’utiliser les 20 premiers points en formation (pour les salariés âgés d’au moins 52 ans au 1er janvier 2015),
doublement des points (pour les salariés âgés d’au moins 59 ans et demi au 1er janvier 2015).
Pour ces salariés, le bénéfice de ces deux mesures dérogatoires reste assez peu généreux, en raison notamment du seuil élevé de l’âge nécessaire pour le doublement des points.

2.1.5. Gestion des comptes pénibilité

La gestion du compte personnel pénibilité est assurée par la branche retraite du régime général : la Caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV) et le réseau des caisses d’assurance retraite et de la santé au travail (CARSAT).

La branche retraite :
enregistre les points sur le compte pénibilité de chaque salarié concerné,
transmet annuellement à chaque salarié le nombre de points qu’il a réunis et les modalités de contestation (les caisses de MSA  peuvent y être associées pour les salariés du secteur agricole),
verse les sommes correspondant aux utilisations qui sont faites du compte :
aux financeurs des actions de formation professionnelle,
aux employeurs au titre des compléments de rémunération pour les salariés bénéficiant d’un temps partiel,
aux régimes de retraite dans le cas d’une réduction de durée de carrière.

Un service d’information sur internet sera mis en place.

2.1.6. Contrôle des expositions et voies de recours des salariés

La branche retraite du régime général et les organismes de MSA ont un pouvoir de contrôle de l’effectivité et de l’ampleur des expositions aux facteurs de pénibilité déclarés par l’employeur.

Ce contrôle peut intervenir pendant les 5 années suivant l’année civile de l’exposition. Suite au contrôle, l’organisme gestionnaire du compte peut notifier une régularisation des points acquis et des cotisations dues, avec une pénalité éventuelle.

Les voies de recours des salariés concernant l’exposition à la pénibilité sont spécifiques :
contestation préalable devant l’employeur,
contestation auprès de la CARSAT, qui rend sa décision après avis d’une commission ad hoc,
recours auprès du Tribunal des affaires de sécurité sociale, dans un délai de maximum de 3 ans après l’année de l’exposition contestée.

Des précisions devront être apportées par décret concernant les conditions
de contrôle des déclarations,
de contestation des expositions par les salariés auprès de leur employeur,
d’assistance ou de représentation du salarié dans le cadre d’un recours juridictionnel.

2.1.7. Financement

Un Fonds de financement des droits liés au compte personnel pénibilité sera mis en place. Le conseil d’administration du Fonds comprend des représentants de l’Etat, des organisations syndicales et patronales.

Les recettes du Fonds reposent sur un dispositif à deux étages :

une cotisation pénibilité appliquée à tous les employeurs, calculée au taux maximum de 0,2% des rémunérations des salariés de chaque entreprise,

une cotisation additionnelle pénibilité pour les employeurs qui ont exposé au moins un salarié à un ou plusieurs facteurs de risque, calculée à un taux compris :
entre 0,3% et 0,8% des rémunérations des salariés exposés à un facteur de risque,
entre 0,6% et 1,6% des rémunérations des salariés exposés simultanément à plusieurs facteurs de risque.

Les taux de la cotisation pénibilité et de la cotisation additionnelle seront précisés par décret, en tenant compte :
des prévisions financières du Fonds au cours des 5 prochaines années,
des recommandations éventuelles du comité de suivi des retraites (cf. 5.2)

2.1.8. Modification des mesures de prévention de la pénibilité prévues par la loi de 2010 dans le cadre d’un accord ou d’un plan d’action

La loi de 2010 prévoyait l’obligation, pour les entreprises d’au moins 50 salariés exposant au moins la moitié de leurs salariés à un facteur de pénibilité, de mettre en œuvre un accord ou un plan d’action de prévention de la pénibilité.

Les obligations en matière de prévention sont modifiées :
La couverture par un plan d’action ne sera possible qu’à défaut d’accord de prévention de la pénibilité, ce qui implique l’engagement préalable d’une négociation avec les représentants des salariés et un constat de désaccord.
Le décompte des salariés exposés à un facteur de risque sera plus restrictif : il prendra en compte des seuils d’exposition fixés par décret.

2.1.9. Le dispositif expérimental de négociation de la compensation de la pénibilité institué par la loi de 2010 est abrogé.

Il prévoyait la possibilité de créer, par accord de branche et jusqu’au 31 décembre 2013, un dispositif d’allègement ou de compensation de la charge de travail des salariés occupés à des travaux pénibles pouvant être financé par la branche Accidents du travail – maladies professionnelles.

2.1.10. Maintien du dispositif de compensation de l’incapacité permanente créé par la loi du 9 novembre 2010

Le dispositif de compensation de l’incapacité prévu par la loi de 2010 est maintenu et inchangé sur le fond et renommé « compensation d’une incapacité permanente ».

Ce dispositif a bénéficié à un nombre très limité de salariés depuis sa création4, compte-tenu du caractère très restrictif des conditions d’accès. Son intitulé était par ailleurs inadéquat.
2.2. Evolution des droits familiaux de retraite à partir de 2020

Le gouvernement remet au parlement :

un rapport sur l’évolution des droits familiaux de retraite5 pour mieux compenser les effets de l’arrivée d’un enfant sur la carrière des femmes, dans les 6 mois suivant l’entrée en vigueur de la loi.

un rapport sur les possibilités de faire évoluer les règles concernant les pensions de réversion, pour mieux prendre en compte le niveau de vie des conjoints survivants et harmoniser les règles entre les régimes, dans l’année suivant la promulgation de la loi.

L’obligation faite au gouvernement de présenter un rapport au parlement sur ces questions est utile mais les avancées prévues restent à concrétiser. L’exposé des motifs de la loi indique la perspective d’une refonte des droits familiaux de retraite à partir de 2020. En effet, certains de ces droits familiaux effectuent des redistributions à l’envers, qui bénéficient davantage aux hommes qu’aux femmes, davantage aux retraités les plus aisés au détriment des plus modestes. C’est notamment le cas de la majoration de pension pour les parents d’au moins 3 enfants, qui est proportionnelle au montant de la pension. Pour la CFDT, le redéploiement de cette majoration vers les femmes, dès le premier enfant et de manière forfaitaire, ne doit pas attendre 2020.

2.3. Amélioration des conditions d’acquisition de trimestres

Pour valider un trimestre au titre de la durée de cotisation, la rémunération nécessaire passe de 200 heures à 150 heures Smic dès le 1er janvier 2014.

Pour valider 4 trimestres de durée de cotisation, il sera nécessaire d’avoir exercé une activité rémunérée au SMIC:
à temps complet durant 4 mois, contre 5 mois et demi antérieurement.
ou à temps partiel tout au long de l’année, si le temps de travail dépasse 11,5 heures par semaine – contre 15,5 heures par semaine antérieurement.

Les modalités d’application seront précisées par décret.
Par ailleurs :
pour empêcher les effets d’aubaine en faveur des plus hautes rémunérations, la loi prévoit la réduction du plafond des rémunérations prises en compte pour le calcul de la durée d’assurance (de 2,15 à 1,5 fois le SMIC, à confirmer par décret).
lorsque moins de 4 trimestres sont validés dans l’année, le report du reliquat de cotisations s’effectue sur l’année civile suivante ou précédente.

La CFDT dénonce l’existence d’inégalités liées aux mécanismes inscrits dans le cœur du système de retraite, notamment le mode de calcul des pensions. Ainsi, le seuil antérieur de rémunération permettant de valider un trimestre – 200 heures Smic – empêchait de nombreux salariés précaires ou à temps partiel de valider 4 trimestres de durée de cotisation au cours de l’année civile.

La réduction du seuil de validation d’un trimestre à 150 heures Smic est une mesure de justice importante, qui améliorera la situation des salariés modestes en particulier parmi :
les jeunes, qui sont nombreux à subir la précarité,
les femmes, qui connaissent plus d’interruptions de carrière et de temps partiels que les hommes. Près de 50% des femmes verront une augmentation de leurs droits à la retraite de base – de l’ordre de 0,5% en moyenne pour la génération née en 1963 et 1% en moyenne pour la génération née en 1970.

2.4. Elargissement de la retraite anticipée pour carrière longue

Le texte pose le principe d’une extension du champ des trimestres considérés comme cotisés au titre de la retraite anticipée pour carrière longue.

Cette extension permettra de considérer comme cotisés pour l’ouverture d’un droit à la retraite anticipée pour carrière longue certains trimestres qui sont validés sans cotisation pour le calcul du montant de la pension :
4 trimestres validés au titre du chômage (au lieu de 2 trimestres depuis 2012),
2 trimestres au titre de l’invalidité,
l’ensemble des trimestres validés au titre de la maternité.

Les modalités d’application seront précisées par décret.

Cette mesure élargira le nombre de bénéficiaires du dispositif de retraite anticipée pour carrière longue, obtenu par la CFDT en 2003. Ce dispositif a d’ores et déjà permis à plus de 700 000 salariés ayant commencé à travailler jeunes de partir en retraite avant l’âge légal. Il s’agit bien souvent des salariés les plus modestes.

2.5. Prise en compte de toutes les périodes d’apprentissage

Les apprentis bénéficient désormais d’une validation de trimestres pour la retraite sur toute la durée de leur contrat d’apprentissage.

Cette mesure repose sur deux mécanismes :

Les cotisations sociales des apprentis destinées aux régimes de retraite de base sont désormais calculées sur leur rémunération réelle et non plus sur une assiette forfaitaire. Cette mesure est applicable dès la publication de la loi.

Si, suite à ce calcul, le nombre de trimestres validés pour la période d’apprentissage ne correspond pas à la durée du contrat, un ou plusieurs trimestres complémentaires seront validés et pris en charge par le Fonds de solidarité vieillesse, dans des conditions à préciser par décret.

Pour un contrat d’apprentissage de 3 ans, le nombre de trimestres validés passera en moyenne de 8 à 12, quelle que soit la rémunération. Cette mesure corrigera une inégalité que la CFDT dénonce depuis de nombreuses années.

2.6. Prise en compte de toutes les périodes de formation des demandeurs d’emploi

A compter du 1er janvier 2015, toutes les périodes de formation professionnelle donnant lieu à cotisation par l’Etat ou la Région, avec ou sans rémunération, seront considérées comme validées au titre des droits à la retraite.

Chaque période de 50 jours de stage de formation professionnelle permettra de valider un trimestre. La mesure sera prise en charge par le Fonds de solidarité vieillesse (FSV).

L’assiette de cotisation antérieure était très faible (1/6ème du SMIC) et permettait de valider au maximum un trimestre. Il s’agit d’une extension significative des droits des stagiaires de la formation professionnelle.

2.7. Instauration d’un tarif préférentiel de rachat de trimestres

Le texte prévoit une possibilité de rachat à tarif préférentiel de trimestres correspondant à :
des années d’études supérieures,
des périodes d’apprentissage comprises entre le 1er janvier 1972 et le 31 décembre 2013,
des périodes d’activité incomplète des assistantes maternelles.

Un décret précisera que le tarif préférentiel s’appliquera :
dans un délai de 10 ans après la période faisant l’objet du rachat,
dans la limite de 4 trimestres parmi les 12 qu’il est possible de racheter au total,
au moyen d’une aide forfaitaire par trimestre racheté (de l’ordre de 50% du tarif en vigueur, soit environ 1000 € par trimestre).

Cette mesure prolonge utilement, au-delà de 1972, les possibilités de rachat existantes concernant les périodes d’apprentissage non-validées. S’agissant des périodes d’études supérieures, la CFDT considère que l’aide au rachat de trimestres est très discutable. Le coût du rachat restera élevé même après l’application du tarif préférentiel, qui bénéficiera surtout aux jeunes salariés les mieux lotis.

2.8. Validation des périodes de stage en entreprise au titre de la retraite

Les étudiants pourront valider pour la retraite les périodes de stage en entreprise6, dans la limite de 2 trimestres.

Il leur faudra pour cela verser des cotisations d’assurance vieillesse à tarif préférentiel, soit 300 € par trimestre racheté. Il serait possible d’échelonner le paiement afin que la cotisation représente
12,5 € par mois pendant 2 ans,
ou 25 € par mois pendant 1 an.

Le délai de présentation de la demande est au maximum de 2 ans. Ces trimestres seront enregistrés au titre des rachats d’années d’étude supérieures (plafonnés à 4 au maximum cf. 2.7)

Les modalités d’application seront précisées par décret.

Il s’agit d’une mesure positive qui a été obtenue par la CFDT. Elle permettra de mieux prendre en compte les périodes de stage en entreprise, qui concernent aujourd’hui 9 jeunes diplômés sur 10.

2.9. Assouplissement de la condition de ressources du minimum contributif

Le seuil de ressources pour percevoir le minimum contributif sera porté par décret de 1028 € à 1120 € mensuels.

Le minimum contributif permet d’augmenter la pension de salariés à bas salaire du secteur privé.
Depuis 2012, il était attribué sous condition de ressources, de telle sorte que le montant total des pensions personnelles7 ne devait pas dépasser 1028 € par mois.

Les modalités d’application seront précisées par décret.

Cette mesure constitue une réponse à une partie des demandes portées par la CFDT concernant l’amélioration des basses pensions. Pour certains nouveaux retraités modestes, le gain lié à l’assouplissement de la condition de ressources du minimum contributif pourra atteindre jusqu’à 92 € mensuels.

2.10. Unification du calcul de la retraite des polypensionnés du secteur privé

Au plus tard le 1er janvier 2017, la pension sera calculée de manière unifiée pour les polypensionnés de trois régimes du secteur privé – régime général, salariés agricoles, indépendants.

La pension des polypensionnés du secteur privé sera calculée sur la base :
de la rémunération des 25 meilleures années de carrière quel que soit le régime d’affiliation : les rémunérations ayant donné lieu à cotisation seront additionnées pour chaque année civile.
de la durée de cotisation dans l’ensemble des régimes : les trimestres validés seront additionnés dans la limite de 4 par année civile.

Un seul régime versera la pension, en fonction d’une règle de priorité à préciser par décret. Les modalités de compensation financière entre régimes seront également définies par voie réglementaire.

La CFDT demande depuis de nombreuses années une meilleure prise en compte de la situation des polypensionnés. Ceux-ci sont pénalisés : le montant moyen de leur pension est inférieur de 8% à celui des salariés ayant cotisé dans un seul régime, à carrière identique8. Or les polypensionnés représentent déjà plus de 40% des nouveaux retraités. Cette proportion a vocation à augmenter à l’avenir compte tenu de parcours professionnels davantage marqués par les ruptures et les mobilités.

L’unification du calcul des pensions des polypensionnés du secteur privé constitue à la fois une mesure de réduction des inégalités, de simplification des démarches pour les salariés et d’harmonisation des régimes concernés.

Cependant, la loi ne prévoit aucune disposition concernant les polypensionnés public / privé. Pour améliorer leur situation, la CFDT est favorable à une harmonisation de tous les régimes, à condition de traiter en profondeur la question des carrières et des rémunérations dans les fonctions publiques.

2.11. Mesures en faveur des handicapés et de leurs aidants

2.11.1. Ouverture de la retraite anticipée des travailleurs handicapés aux personnes dont le taux d’incapacité permanent est de 50%, contre 80% aujourd’hui9. La mesure sera effective, dans le public comme dans le privé, pour les pensions prenant effet au 1er février 2014.

La reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH) continuera à être prise en compte pour l’ouverture d’un droit à la retraite anticipée des travailleurs handicapés, pour les seules périodes antérieures au 31 décembre 2015.

La retraite anticipée pour les travailleurs handicapés reste à ce jour peu utilisée compte tenu de la sévérité des conditions d’accès au dispositif. Près de 900 personnes ont bénéficié d’une retraite anticipée en 2012 au titre de la RQTH. L’accès au dispositif via la RQTH s’avérait lacunaire car celle-ci devait être attestée sur toute la carrière. Or de nombreuses personnes qui auraient pu obtenir cette attestation pour des périodes passées n’en ont pas fait la demande (car ce document n’ouvrait pas de droit), et elle n’est pas délivrée rétroactivement.

L’extension de la retraire anticipée aux personnes dont le taux d’incapacité est d’au moins 50% va dans la bonne direction. Cependant, elle ne permettra pas de donner un droit au départ anticipé à tous ceux qui seront pénalisés par la suppression de l’accès au dispositif au titre de la RQTH. L’accès à la retraite anticipée devrait rester ouvert :
aux personnes ayant un taux d’incapacité d’au moins 50 %,
ou bénéficiant de la RQTH.

Une amélioration de l’information des personnes handicapées est souhaitable concernant les différentes possibilités de retraite anticipée.

2.11.2. Retraite à taux plein dès l’âge légal de départ en retraite – 62 ans à partir de la génération 1955 contre 65 ans aujourd’hui – pour les personnes en situation de handicap dont le taux d’incapacité est d’au moins 50%. La mesure s’appliquera aux pensions prenant effet à partir du 1er février 2014 et sera précisée par décret.

A ce jour, seuls les bénéficiaires d’une pension d’invalidité ou de l’allocation d’adulte handicapé bénéficient de l’application du taux plein dès l’âge légal de départ en retraite, quelle que soit leur durée d’assurance. Pour certains assurés souffrant d’un handicap lourd, l’âge d’annulation de la décote restait tardif.

2.11.3. Bénéficie de l’ASPA (ex-minimum vieillesse) dès l’âge légal de départ en retraite (62 ans à partir de la génération 1955) pour les personnes en situation de handicap dont le taux d’incapacité est d’au moins 50%. La mesure s’appliquera aux pensions prenant effet à partir du 1er février 2014.

Seules certaines situations d’inaptitude au travail permettaient l’octroi de l’ASPA à partir de l’âge légal de départ en retraite, au lieu de 65 ans. L’abaissement de la condition d’âge pour les assurés lourdement handicapés est une mesure de justice.

2.11.4. Suppression de la condition de ressources pour l’octroi de trimestres validés et cotisés sur la base du SMIC 10 aux aidants familiaux. La mesure sera effective pour les périodes de prise en charge à compter du 1er février 2014.

La validation de trimestres pour les aidants familiaux qui interrompent leur activité professionnelle afin de s’occuper d’une personne en situation de handicap ou très dépendante ne sera plus liée aux ressources.

2.11.5. Instauration d’une majoration de durée d’assurance pour les aidants familiaux en charge d’un adulte en situation de handicap lourd

Cette majoration est octroyée à 2 conditions :
avoir un lien familial avec la personne aidée,
assumer la charge permanente d’un adulte handicapé ayant un taux d’incapacité permanente supérieur à 80% (taux à confirmer par décret).

La majoration s’élève à 1 trimestre par période de 30 mois de prise en charge à temps complet, dans la limite de 8 trimestres. La mesure sera effective pour les périodes de prise en charge à compter du 1er février 2014.

A ce jour seul les aidants d’enfants en situation de lourd handicap pouvaient bénéficier, à certaines conditions, d’une majoration de durée d’assurance.

3. Modifications des dispositifs d’incitation à la poursuite d’activité

3.1. Assouplissement des conditions d’accès à la retraite progressive

La condition d’âge pour bénéficier de la retraite progressive est ramenée de 62 ans à 60 ans dès 2014.

La retraite progressive permet à un salarié de percevoir une partie de ses droits à pension tout en poursuivant une activité professionnelle à temps partiel. Lors de la cessation définitive d’activité, la pension fait l’objet d’une nouvelle liquidation, qui tient compte des cotisations versées lors de l’activité réalisée à temps réduit.

Pour bénéficier du dispositif il faudra en 2014 remplir 2 conditions :
Avoir réuni au moins 150 trimestres de durée d’assurance tous régimes confondus (un décret confirmera cette durée),
Avoir atteint l’âge minimum de 60 ans.

Il s’agit d’une mesure positive, qui permettra à un plus grand nombre de salariés de bénéficier d’un départ en retraite progressive et d’organiser ainsi une transition plus souple entre travail et retraite. Cependant, certains freins au développement du dispositif demeurent, liés notamment au fait que les refus de temps partiel par l’employeur ne font l’objet d’aucun encadrement spécifique.

3.2. Encadrement du cumul emploi retraite

3.2.1. Généralisation de la cotisation sans acquisition de droits nouveaux

Aujourd’hui, le cumul emploi retraite s’effectue :
sans acquisition de droits nouveaux à la retraite dans le cadre de la reprise d’activité lorsque le salarié est affilié au même régime que celui qui verse la pension. Exemple : reprise d’activité dans le secteur privé pour un retraité percevant une pension du régime général et de l’Arrco.
avec acquisition de droits nouveaux à la retraite dans le cadre de la reprise d’activité lorsque le régime d’affiliation est différent du régime qui verse la pension. Exemple : reprise d’activité dans le secteur privé par un retraité de la fonction publique.

La loi prévoit :
le versement de cotisations sans acquisition de droits nouveaux quel que soit le régime d’affiliation du salarié en situation de cumul emploi retraite, qu’il s’agisse du régime qui lui verse une pension ou d’un autre régime.
la cessation de toute activité professionnelle avant la liquidation d’une pension dans un régime de retraite obligatoire.

Ces dispositions ne sont pas applicables aux bénéficiaires d’une pension militaire, d’indemnités d’élus locaux, ainsi qu’aux salariés en situation de retraite progressive.

Le dispositif concernera toutes les pensions liquidées à compter du 1er janvier 2015. Pour les assurés relevant du régime de retraite des marins, le texte entrera en vigueur au 1er janvier 2018 selon des modalités à préciser par décret.

Cette disposition est une mesure d’harmonisation des règles du cumul emploi retraite, qui concernera les nouveaux entrants dans le dispositif de cumul inter-régimes. Son application a été reculée d’un an par rapport au premier projet du gouvernement, pour ne pas remettre en question les conditions de reprise d’activité de certains salariés proches du départ en retraite.

3.2.2. Assouplissement des règles de plafonnement du cumul emploi retraite au sein d’un même régime du secteur privé

Auparavant, le versement de la pension du régime de base était suspendu lorsque les 3 conditions suivantes étaient réunies :
la pension n’avait pas été liquidée à taux plein,
la reprise d’activité s’effectuait dans le régime qui verse la pension,
le montant cumulé des revenus professionnels et des pensions des régimes de base et complémentaire était supérieur à un plafond variable selon les régimes.11

Pour le cumul emploi retraite dans un seul et même régime du secteur privé, la loi prévoit que le dépassement du seuil de ressources se traduira désormais, par une réduction du montant de pension à concurrence du dépassement, au lieu d’une suspension totale.

Le dispositif antérieur impliquait, en cas de dépassement même très faible de la condition de ressources, le remboursement des pensions perçues sur une période d’une année.

3.2.3. Suppression de la possibilité de cumul entre allocation d’assurance chômage et pension de retraite dans le cadre d’un départ anticipé

La loi prévoit l’impossibilité de cumul entre allocation chômage et pension perçue à taux plein en cas de départ anticipé avant l’âge légal.

Les bénéficiaires d’une retraite anticipée12 pouvaient jusqu’alors cumuler jusqu’à l’âge légal de la retraite – 62 ans à partir de la génération née en 1955 – une allocation chômage et une pension perçue à taux plein.

3.2.4. Ouverture d’une possibilité de cumul de l’allocation de solidarité aux personnes âgées avec des revenus d’activité

L’étude d’impact de la loi, publiée par l’Assemblée nationale, indique que « le gouvernement mettra en place, par décret en Conseil d’Etat, un mécanisme d’intéressement à la reprise d’activité pour les bénéficiaires de l’ASPA ». Une partie des revenus d’activité serait exclue de la condition de ressources de l’ASPA.

La CFDT sera attentive à ce que l’ouverture d’une possibilité de cumul entre ASPA et revenu d’activité soit strictement encadrée. La prise en compte de la situation individuelle de certains retraités parmi les plus modestes ne doit pas occulter les exigences collectives concernant l’amélioration du montant des minima sociaux, notamment l’ASPA, et les conditions de travail et de rémunération dans les secteurs d’activité qui seront concernés.

4. Simplification du système de retraite

4.1. Création d’un compte individuel retraite pour chaque assuré

D’ici le 1er janvier 2017, un compte individuel en ligne sera créé. Il permettra :
d’accéder au relevé de carrière,
d’effecteur une simulation du montant de la pension future,
d’effectuer des démarches auprès services des différents régimes,
de réaliser à terme une demande unique de retraite en direction des différents régimes.

Sous l’impulsion de la CFDT, le droit à l’information en matière de retraite s’est mis en place progressivement depuis 2003. La lisibilité des droits à la retraite des salariés a progressé grâce à l’envoi régulier de relevés de carrière et d’évaluations du montant de la pension. Cependant, les démarches restent complexes pour les assurés, en particulier au moment du départ en retraite.

Le développement de l’offre de services dématérialisés renforcera ces évolutions et la capacité des salariés à anticiper leurs droits à pension en cours de parcours professionnel, afin d’augmenter leurs possibilités de choix sur le moment et le rythme de leur départ en retraite. La mise en œuvre à terme d’une demande unique de retraite contribuera à simplifier les démarches des assurés et à garantir qu’ils ont fait valoir l’ensemble de leurs droits.

4.2. Information des personnes éligibles à l’Allocation de solidarité aux personnes âgées (ex-minimum vieillesse)

Les caisses de retraite chargées de verser l’ASPA aux retraités les plus modestes devront adresser une information spécifique aux bénéficiaires potentiels de l’ASPA.

L’accès au droit des bénéficiaires de minima sociaux reste lacunaire, y compris en ce qui concerne l’ASPA. Selon la Cour des comptes, près de 150 000 personnes qui pourraient bénéficier de l’allocation n’en ont pas fait la demande13. L’absence d’information des personnes potentiellement éligibles à l’ASPA à partir de l’âge de 65 ans et l’existence d’un dispositif de récupération sur la succession au décès du bénéficiaire contribuent à expliquer le non-recours au droit.

La CFDT a pesé pour que le texte de loi remédie à cette situation et prévoie le repérage systématique des bénéficiaires potentiels de l’ASPA ainsi que leur bonne information. Cette information devra concerner non seulement l’éligibilité à l’allocation mais aussi les conditions de la récupération sur la succession lors du décès du bénéficiaire.

4.3. Clarification des critères d’affiliation des salariés entre les régimes Ircantec et Arrco – Agirc

Aujourd’hui, la nature juridique de l’employeur constitue un critère d’affiliation dans les régimes de retraite complémentaire :
les employeurs relevant du droit public versent des cotisations à l’Ircantec,
les employeurs de droit privé relèvent de l’Arrco-Agirc.
En pratique, il y a cependant de nombreuses exceptions à ce principe.

La loi prévoit un changement des règles d’affiliation dans les régimes complémentaires, qui s’appuie sur la nature juridique du contrat de travail :
les salariés relevant d’un contrat de droit public seront affiliés à l’Ircantec
ceux relevant d’un contrat de droit privé seront affiliés à l’Agirc Arrco.
Les droits acquis dans le régime antérieur au changement seront maintenus.

Plusieurs exceptions sont posées :
pour les salariés embauchés dans le cadre d’un contrat de travail aidé, qui seront affiliés en fonction de la nature juridique de l’employeur,
pour les salariés « déjà affiliés à un régime de retraite complémentaire à la date du 1er janvier 2017 ». Ces assurés voient leur affiliation actuelle maintenue jusqu’à la rupture de leur contrat de travail.

Des dispositions transitoires seront prises jusqu’au 31 décembre 2016 pour les salariés dont l’employeur est aujourd’hui adhérent à un seul régime de retraite complémentaire pour l’ensemble des salariés, soit l’Agirc Arrco soit l’Ircantec.

Dans ce cas, le régime d’affiliation actuel reste compétent :
pour les salariés embauchés avant la promulgation de la loi,
et pour les nouveaux embauchés jusqu’au 31 décembre 2016.
A l’issue de cette période transitoire, toute nouvelle affiliation devra respecter le critère de la nature juridique du contrat de travail.

Ces dispositions sécurisent l’existence juridique de l’Ircantec. Elles posent des règles d’affiliation plus solides que celles en vigueur jusqu’alors. Elles prévoient des possibilités de compensations financières inter-régimes.

4.4. Réduction de la clause de stage pour les militaires

La durée de services permettant d’ouvrir un droit à pension militaire sera désormais ramenée de 15 ans à 2 ans pour les militaires dont le premier engagement a été conclu après le 1er janvier 2014.

Aujourd’hui, les militaires n’ayant pas réuni 15 années de services n’ont pas droit à une pension de la fonction publique. Ces titulaires sans droit à pension doivent être affiliés rétroactivement auprès du régime général et du régime de retraite complémentaire des non-titulaires de la fonction publique (Ircantec), à des conditions défavorables.

La clause de stage des militaires sera à l’avenir alignée sur celle des fonctionnaires civils, soit 2 années de services depuis la loi de 2010. Cette disposition concerne ceux qui ont une carrière de moins de 15 ans dans l’armée et pourront bénéficier d’une pension militaire au prorata de leurs années de services. Il s’agit bien souvent de futurs polypensionnés des régimes du public et du privé

4.5. Mutualisation du service des très petites pensions

A ce jour les pensions du secteur privé d’un montant inférieur à 156 € annuels font l’objet d’un versement forfaitaire unique à l’assuré dont les règles de calcul sont complexes.

A partir du 1er janvier 2016, les pensions personnelles de très faible montant donneront lieu à :
un versement en rente pour les polypensionnés, réalisé de manière unifiée par le régime servant la pension la plus élevée. La mesure ne concerne pas les polypensionnés ayant déjà liquidé une pension au 1er janvier 2016.
un remboursement des cotisations versées pour les retraités d’un seul régime et ayant validé au maximum 8 trimestres.

Cette mesure de simplification concernera environ 35 000 nouveaux retraités par an, quasiment tous polypensionnés.
5. Gouvernance du système de retraite

5.1. Définition des objectifs du système de retraite

Le texte réaffirme le choix de la retraite par répartition, qui s’appuie principalement sur les revenus du travail et implique une relation entre le montant des revenus d’activité et le montant de la pension de retraite.

Les objectifs du système de retraite sont :
l’équité au regard de la durée et du montant de la pension,
la solidarité entre les générations et au sein de chaque génération,
la pérennité financière.

Les objectifs du système de retraite prévus par la loi de 2010 sont partiellement repris et complétés. L’égalité entre les femmes et les hommes, la garantie d’un niveau de vie satisfaisant pour tous les retraités, ainsi que la prise en compte des périodes d’interruption involontaire d’activité s’inscrivent dans le cadre de l’objectif de solidarité entre les générations et au sein de chaque génération. Quant à la pérennité financière du système de retraite, il est précisé qu’elle suppose de rechercher le plein emploi.

5.2. Modalités de pilotage du système de retraite

Les modalités de pilotage s’appuient sur un dispositif annuel en 4 temps :

Un rapport du Conseil d’orientation des retraites (COR) avant le 15 juin de chaque année. Ce rapport sera établi à partir d’une liste d’indicateurs de suivi du respect des objectifs du système de retraite.

Un avis public du Comité de suivi des retraites avant le 15 juillet de chaque année. Ce comité est composé de 5 personnes désignées en fonction de leurs compétences en matière de retraite et sera accompagné dans ses travaux par un jury citoyen de 18 personnes tirées au sort. Son avis annuel analysera :
le respect des objectifs du système de retraite (à partir du rapport du COR),
la prise en compte de la pénibilité au travail,
la situation comparée des droits à pension dans les différents régimes,
la situation comparée des femmes et des hommes en matière de retraite,
l’évolution du pouvoir d’achat des retraités, en particulier ceux dont les revenus sont inférieurs au seuil de pauvreté.

Si des écarts significatifs sont constatés entre les objectifs et les réalisations, cet avis sera assorti de recommandations à l’attention des pouvoirs publics et de l’ensemble des régimes de retraite de base et complémentaires. Ces recommandations peuvent concerner notamment :
le taux de cotisation retraite dans les régimes de base et complémentaires,
l’évolution de la durée d’assurance,
les transferts du Fonds de réserve des retraites vers les régimes pour prendre en charge leurs déséquilibres conjoncturels,
l’affectation d’autres ressources au système de retraite pour financer des prestations non-contributives,
le renforcement de la solidarité au sein des régimes en répartition si les évolutions économiques ou démographiques sont plus favorables que prévu.

Le gouvernement présente au Parlement, après consultation des partenaires sociaux, les suites qu’il entend donner aux recommandations du comité de suivi.

Les modalités de pilotage antérieures sont abrogées, notamment le comité de pilotage des régimes de retraite (COPILOR), créé en 2010 et mort-né en 2011.
Les nouvelles dispositions :
confirment la mission d’élaboration d’un diagnostic partagé par le COR,
intègrent une évaluation de l’atteinte des objectifs du système de retraite à la fois quantitative et qualitative, avec un accent particulier sur la pénibilité, les inégalités entre les femmes et les hommes, la situation des retraités modestes,
permettent au comité de suivi des retraites de formuler des préconisations concernant les régimes de retraite de base et complémentaires, dans certaines limites de taux de cotisation et de taux de remplacement,
remettent les décisions dans les mains du gouvernement, dans le cadre public d’une présentation devant le parlement.

5.3. Création d’une instance de pilotage des projets de simplification inter-régimes

La loi met en place une Union des institutions et services de retraite (UISR), chargée de piloter l’ensemble des projets de coordination, simplification et mutualisation entre régimes de retraite.

Cette instance sera notamment chargée :
de la mise en œuvre de bases de données inter-régimes et d’échanges de données inter-régimes14,
de la gestion du compte individuel retraite en ligne, qui s’appuie sur une base de données inter-régimes (cf. 3.1) et comportera à terme une demande unique de retraite.

Elle reprendra les missions du GIP Info retraite – notamment l’envoi des relevés de carrière et des estimations de montant de pension. L’UISR prendra la forme d’un groupement d’intérêt public doté d’un conseil d’administration. Ses relations avec l’Etat seront contractualisées sur 4 ans.

La mise en place d’une Union des institutions et services de retraite constitue une étape importante pour mettre en place des outils qui amélioreront les relations entre les régimes d’une part, les salariés et les retraités d’autre part.
La connaissance du parcours de carrière de l’assuré dans l’ensemble des régimes est une condition nécessaire pour élaborer des évaluations de montant de pension de qualité.
La connaissance des pensions liquidées dans les autres régimes est une information indispensable pour repérer notamment les basses pensions, afin de mieux cibler les mesures en leur faveur.
Le compte individuel retraite en ligne permettra de simplifier les démarches de liquidation de pension au moment du départ en retraite, parfois encore fastidieuses (en particulier pour les polypensionnés).

5.4. Débat annuel sur les retraites dans les fonctions publiques

Tous les ans, le gouvernement organise, au sein du conseil commun de la fonction publique, un débat avec les organisations syndicales de fonctionnaires sur les orientations de la politique de retraite dans la fonction publique.

Il s’agit d’une évolution utile pour établir un dialogue régulier sur la question des retraites dans la fonction publique.

5.5. Publication de rapports

Ils aborderont les thèmes suivants :

L’opportunité de revenir sur le taux de la décote et sur le recul de 65 à 67 ans de l’âge du départ à la retraite à taux plein (avant le 1er janvier 2015).

L’évolution des conditions de pénibilité auxquelles les salariés sont exposés et  la mise en œuvre des dispositifs créés par la loi de 2013, notamment les conditions de pénibilité des métiers exercés majoritairement par des femmes (tous les 5 ans).

La reconversion des salariés inaptes (avant le 1er janvier 2015).

La situation des demandeurs d’emploi nés en 1952 et 1953, qui n’ont pas eu accès à l’allocation transitoire de solidarité (ATS) alors qu’elles réunissaient les conditions pour en bénéficier (avant la fin mars 2014).

L’application des conventions internationales bilatérales en matière de retraite (avant le 1er juillet 2014).

L’évolution des droits familiaux de retraite (avant le 20 juillet 2014).

La possibilité de faire évoluer les règles relatives aux pensions de réversions (avant le 20 janvier 2015).

L’ouverture de droits à la retraite au titre des études (avant le 15 juillet 2015).

Les retraites des salariés agricoles de la Guadeloupe, de la Martinique et de La Réunion, notamment sur les modalités de mise en place d’un dispositif de retraite complémentaire au bénéfice de ces salariés (avant le 20 juillet 2014)

L’opportunité de la création d’un compte travail handicap (avant le 20 janvier 2015).

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